Un bonheur que je ne souhaite à personne - S. Le Bihan

 

Un titre et des pages à méditer : mieux agir face à l'autisme

 

Un bonheurLa dédicace : « À ma fille qui, chaque jour, repeint le monde
d'une poésie éblouissante et fiévreuse. Tes éclats lumineux
me laissent toujours désarmé et spectateur fasciné ».
(Transfert dans le récit via une mère et son fils autiste).



Chers lecteurs, avant d'en venir à un extrait plein d'émotion et de vérité, d'un "J'ai lu" signé par le très populaire et très aimé acteur Samuel Le Bihan, papa d'une fille autiste, laissez-nous d'abord tenter de contextualiser cette différence, aux niveaux scientifique et social (bien au delà de la Journée Mondiale de l'Autisme du 2 avril dernier, pour laquelle Samuel Le Bihan était également et naturellement présent sur nos écrans).

L'Élysée a dévoilé un plan stratégique sur les troubles neurodéveloppementaux (voir la strategie nationale et englobante, planifiée jusqu'en 2027) qui touchent un français sur six (!). Selon les informations de "Marianne", 500 millions d'euros devraient être investis dans la recherche et le dépistage précoce avec la création d'un "service public du repérage". Les classes adaptées devaient être doublées, en principe... à vérifier... Des lieux de vie de petite taille devraient aussi être créés pour les adultes. Par ailleurs, un guide sera édité pour les policiers, afin qu''ils adaptent leurs interrogatoires lorsqu'ils sont confrontés à une personne autiste ou avec un trouble de l'attention (TDAH). Très logique, et il n'est jamais trop tard...!

Impressionante augmentation en vingt ans : autrefois considérés comme rares, les troubles autistiques touchent désormais un enfant sur 36... soit près d'un élève par classe ! Les diagnostics sont devenus plus précis, plus systématiques (même trop systématiques... paraît-il qu'on assiste à une inflation en la matière. Ce qui n'empêche pas que leur nombre ait réellement augmenté). Auparavant, les médecins se contentaient de nommer le premier symptôme, sans creuser davantage : anxiété, déficience, dépression. Des symptômes qui, de fait, sont souvent associés à l'autisme.
Une majorité d'autistes, à l'âge adulte, sont sans emploi ou ne travaillent qu'à temps partiel ; ou encore, ils sont surqualifiés pour le poste qu'ils occupent. D'autres symptômes : très forte distractibilité, hyperactivité motrice, et impulsivité. On disait autrefois que c'étaient des enfants qui n'étaient pas scolaires, se contentant de ce constat.

Bon à savoir : si, aux États Unis, les enfants sont trop facilement traités par le méthylphénidate, une amphétamine qui permet de fixer l'attention de l'enfant et de sauver des scolarités, c'est l'inverse en France où de nombreux professionnels de santé restent hostiles à cette prescription, avançant pour certains la présence et l'avidité d'un lobby médical exploitant cette pathologie. À méditer et à approfondir...

Face à des élèves qui peuvent être violents ou déroutants (disons aussi, parfois littéralement ingérables, selon nos propres souvenirs...), les professeurs se sentent démunis (disons aussi perdus), également agacés - malgré toute la bonne volonté du monde, sur tous les plans, et dans le cadre de classes surchargées ! - par un surcroît de travail pouvant aussi ne pas amener de progrès du tout. Les enseignants (comme le fait toujours remarquer "Marianne") peuvent aussi être exaspérés à cause de parents soit ultra-exigeants, soit dans le déni, au point de laisser l'enfant sans soins !

Laura, jeune mère de deux garçons dont un autiste, n'est pas du tout dans le déni, mais bien dans le sacrifice et dans l'action, pour son combat quasi solitaire, pour plus de justice, à commencer par l'attribution d'une assistante ou AESH pour son fils César, sept ans, qui lui a bien été octroyée pour sa scolarité et qui, par une absurde mécanique administrative, lui a été enlevée au moment même où son fils commençait à faire de réels progrès (on y croit aussi, aux progrès... bien sûr, cela dépend de plusieurs facteurs, sans doute).

L'on pourrait également parler du titre (voulu par l'éditeur ?) qui, à nos oreilles et de manière peut-être erronée, sonne comme un coup de poing malgré le premier terme, "bonheur". Mais il fallait peut-être passer par là pour rendre toute la complexité, le courage et les efforts épiques des parents, dont la séparation (comme dans notre livre) est bien dûe (principalement ou seulement) à l'existence de ces créatures, de ces personnes différentes mais que l'on ne saurait discriminer, sans faire beaucoup de tort au genre humain. L'école étant sans doute un domaine à part, fondamental, qui mérite de longues et sages réflexions. 

La page la plus touchante selon nous ? Ouvrez à la page 73, qui est aussi une ouverture de chapitre :

« Dans sa chambre ce matin, César range les choses qui l'entourent, selon un ordre qui n'appartient qu'à lui. C'est une recherche de pureté de la ligne, d'angles droits, de points de fuite où l'à-peu-près n'est pas toléré. Mon fils est un artiste des objets du quotidien. En vérité, c'est une façon plus acceptable pour lui d'aborder son environnement : l'ordonnancement des objets crée un cadre rassurant et protecteur qui apaise ses angoisses.
Qu'y a-t-il dans ta tête, mon fils ? Qu'y a-t-il dans ta tête que je ne peux pas connaître ? Comment nous perçois-tu depuis ton poste d'observation ? À quoi ressemble ce monde que tu reçois d'un bloc ? Je sais que tu ne hiérarchises pas tes émotions, que ton cerveau ne fait pas la différence entre hier et il y a trois ans, que les sons de la ville t'arrivent dans une cacophonie épouvantable. Puisque tu ne peux guérir et que je ne peux te rejoindre dans ton monde, je vais t'attirer au maximum dans le mien, mais jusqu'à quel point pourras-tu le tolérer ? ».

Pour conclure sur ce qui mérite une constante attention, le lien qui suit, pour un exemple de titre sur ce sujet délicat qui, heureusement, se démocratise fortement (en théorie du moins). Un guide qui semble bien vous tenir par la main si vous êtes un parent ou un proche concerné. Ce titre est le fruit d’un travail collaboratif entre cinq psychologues travaillant dans des structures sanitaires ou médico-sociales, et se fonde aussi sur des expériences cliniques, sans exclure les témoignages de personnes avec autisme (ou TSA). Une référence précieuse pour aller de l'avant, ensemble, en cherchant toujours ce qui unit.